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Comment les rayonnements aident-ils à lutter contre les insectes ravageurs ?

Le nucléaire expliqué
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Les insectes ravageurs tels que les moustiques sont à l’origine de plusieurs maladies, comme la malaria et la dengue, qui touchent des millions de personnes et provoquent des milliers de décès chaque année.

Certains insectes parasites, tels que les mouches parasites, peuvent menacer des écosystèmes entiers, et ainsi compromettre la préservation à long terme de la faune et de la biodiversité. D’autres, tels que les mouches des fruits, les hétérocères, les mouches tsé-tsé et les larves de la lucilie bouchère, ravagent les cultures et le bétail, nuisant aux moyens de subsistance des agriculteurs, au commerce international et à la sécurité alimentaire mondiale. Selon des données officielles, en 2021, les insectes ravageurs ont endommagé jusqu’à 40 % des cultures mondiales et causé 220 milliards de dollars de pertes.

Les rayonnements peuvent aider à surveiller et à combattre les ravageurs, et ainsi à prévenir les risques que ceux-ci constituent pour la santé humaine et animale, les écosystèmes et la sécurité alimentaire (notamment la production végétale et animale). Les méthodes radiologiques de lutte contre les ravageurs sont notamment la technique de l’insecte stérile (TIS), la stérilité héréditaire et la lutte biologique.

Qu’est-ce que la technique de l’insecte stérile (TIS) ?

(Infographie : Adriana Vargas/AIEA).

La technique de l’insecte stérile consiste à utiliser les rayonnements ionisants pour stériliser un grand nombre d’insectes élevés en laboratoire. Ceux-ci sont ensuite lâchés au-dessus de zones infestées pour s’accoupler avec la population sauvage d’insectes ravageurs. Les insectes stérilisés étant incapables d’engendrer une descendance, la population diminuera au fil du temps.

Bien que l’on puisse lâcher à la fois des mâles et des femelles stériles dans le cas de plusieurs espèces d’insectes, pour la TIS, il vaut généralement mieux ne lâcher que les mâles : les mâles stériles sont beaucoup plus efficaces pour limiter la reproduction des populations sauvages car ils recherchent activement des femelles sauvages pour s’accoupler et peuvent le faire avec plusieurs d’entre elles. L’utilisation exclusive de mâles accélère ainsi la stérilisation, puisque les mâles stériles ne s’accouplent qu’avec les femelles sauvages, sans être distraits par des femelles stériles. De plus, au cas improbable où le processus de stérilisation ne fonctionnerait pas, on ne risque pas d’introduire des femelles fertiles dans l’environnement. L’utilisation exclusive de mâles permet également de réduire de moitié les coûts d’emballage et de lâcher. Enfin, cette approche est beaucoup plus sûre, car dans certains cas, le lâcher d’insectes femelles peut avoir des conséquences néfastes. Par exemple, seules les moustiques femelles nous piquent pour se nourrir de notre sang, source de protéines, et elles seules peuvent donc propager des maladies mortelles.

La TIS est l’une des méthodes de contrôle des naissances d’insectes les plus sûres mais également les plus respectueuses de l’environnement, car elle permet de limiter l’utilisation d’insecticides. En outre, puisque les insectes stériles ne peuvent pas se reproduire, elle constitue une solution à long terme au problème des ravageurs, sans risque d’introduire des espèces non indigènes dans l’écosystème.

Depuis les années 1950, la TIS est utilisée avec succès dans la lutte mondiale contre certains insectes qui menacent notre santé et celle du bétail, tels que la lucilie bouchère du Nouveau Monde, la mouche tsé-tsé et les moustiques vecteurs de maladies. Elle aide également à lutter contre les insectes ravageurs, tels que les mouches des fruits et les hétérocères, qui endommagent les récoltes et entravent les échanges commerciaux.

Qu’est-ce que la stérilité héréditaire ?

Les hétérocères nuisibles peuvent être stérilisés, mais avec de fortes doses de rayonnements, qui tendent à affaiblir leur capacité de rivaliser avec les mâles sauvages. C’est pourquoi on préfère utiliser des doses semi-stérilisantes et moins débilitantes pour obtenir une descendance totalement stérile. Cette méthode est appelée « stérilité héréditaire » (Infographie : Adriana Vargas/AIEA).

 

La stérilité héritée est un autre type de TIS. Comme dans la méthode classique, des insectes mâles sont élevés, irradiés, partiellement stérilisés puis lâchés au-dessus d’une zone spécifique pour réduire les possibilités d’accouplement de leurs congénères fertiles. Certains de ces insectes mâles restent fertiles, mais toute leur descendance naît stérile.

Cette technique est utilisée lorsque les mâles d’un type particulier de ravageurs, tels que les hétérocères, ne peuvent être complètement stérilisés à moins de recourir à des doses élevées de rayonnements pouvant les empêcher de rivaliser avec les hétérocères sauvages pour la reproduction. Cette technique consiste donc à utiliser des doses beaucoup plus faibles et moins débilitantes, qui n’empêchent pas les insectes de se reproduire, mais qui induisent une stérilité héréditaire chez leur descendance.

La stérilité héréditaire présente plusieurs avantages : elle permet aux scientifiques de cibler des espèces dont la stérilisation exige des doses élevées de rayonnements. Tandis que les femelles deviennent complètement stériles après l’irradiation parce qu’elles sont plus sensibles aux rayonnements, les mâles irradiés deviennent partiellement stériles et engendrent une descendance complètement stérile. Pour réduire les populations d’insectes sauvages, on obtient généralement de meilleurs résultats en lâchant des mâles partiellement stériles à stérilité héréditaire que des mâles complètement stériles issus d’une TIS classique, car les premiers peuvent engendrer plusieurs descendants totalement stériles.

Qu’est-ce que la lutte biologique ?

Une coccinelle se nourrissant d’œufs d’hétérocères sur un plant d’asperge (Infographie : Adriana Vargas/AIEA).

 

La lutte biologique est une méthode faisant appel à l’élevage en masse et au lâcher d’ennemis naturels des ravageurs, tels que les insectes prédateurs qui se nourrissent d’œufs et de larves des ravageurs, ou les parasites (parasitoïdes) qui pondent des œufs sur l’insecte hôte et le tuent.

Contrairement à la TIS et à la méthode de la stérilité héréditaire, qui reposent essentiellement sur les techniques nucléaires, la lutte biologique n’utilise ces techniques que dans des cas spécifiques. Les rayonnements peuvent être utilisés pour améliorer les résultats, le rapport coût-efficacité et la sûreté de l’élevage, du transport et du lâcher de ces ennemis naturels des ravageurs. Ils permettent également d’améliorer les résultats de la méthode et de réduire certaines contraintes d’utilisation. Par exemple, les rayonnements peuvent être utilisés pour réduire les coûts d’élevage d’agents de lutte biologique. Dans le cas des parasitoïdes, ils peuvent aider à affaiblir les défenses naturelles de l’insecte hôte (réponse immunitaire) pour accroître la productivité et le taux de survie des parasitoïdes, tout en prévenant le développement des insectes hôtes, pour que seuls les parasitoïdes émergent des pupes. Lorsque certains insectes hôtes survivent, les rayonnements permettent de les stériliser pour éviter de lâcher des insectes hôtes fertiles, qui peuvent devenir des parasites dans leur nouvel environnement (voir l’infographie ci-dessous). Dans certains cas, de faibles doses de rayonnements peuvent également favoriser la reproduction de certains prédateurs et faciliter ainsi la lutte biologique dans les zones où ces prédateurs ne menacent pas certaines populations d’insectes.

La lutte biologique permet de combattre les insectes ravageurs et l’irradiation de l’hôte de l’agent de lutte biologique permet d’éviter l’introduction accidentelle de nouveaux ravageurs dans l’environnement (Infographie : Adriana Vargas/AIEA).

L’irradiation facilite également le transport d’insectes prédateurs et de parasitoïdes (agents de contrôle biologique). Lors du transport, les parasitoïdes peuvent avoir besoin d’insectes hôtes pour survivre, et les insectes prédateurs peuvent avoir besoin d’autres insectes pour se nourrir. Ils sont donc généralement transportés avec leurs « insectes proies » ou les œufs de ces derniers. Toutefois, les parasitoïdes ne détruisent pas tous les insectes hôtes. Si ces derniers parviennent à survivre lors du transport et sont lâchés dans l’environnement, ils deviendront des ravageurs. En irradiant l’insecte hôte avant le transport, on s’assure qu’aucun nouveau ravageur ne sera lâché accidentellement dans la zone de lutte biologique.

Quel est le rôle de l’AIEA ?

  • Par l’intermédiaire du Centre mixte FAO/AIEA des techniques nucléaires dans l’alimentation et l’agriculture, l’AIEA aide les pays à développer et à utiliser des techniques fondées sur les rayonnements, telles que la TIS, la stérilité héréditaire et la lutte biologique, afin d’améliorer les pratiques de lutte contre les insectes ravageurs. L’objectif final est d’améliorer la production alimentaire et la santé humaine et de mieux préserver les ressources naturelles.
  • L’AIEA effectue des travaux de recherche et met au point de nouvelles méthodes dans ses laboratoires de Seibersdorf (Autriche) pour renforcer les connaissances et améliorer les techniques d’élevage en masse, de stérilisation et de contrôle de la qualité des principaux insectes ravageurs. Les résultats des travaux de recherche, les nouvelles procédures et méthodologies sont partagés avec les États Membres afin d’améliorer leurs pratiques de lutte contre les ravageurs.
  • Le Département de la coopération technique de l’AIEA, avec l’appui du Centre mixte FAO/AIEA, contribue au transfert de technologies pour gérer les espèces de ravageurs et préserver la faune indigène et les écosystèmes.
  • Par l’intermédiaire de ses projets de recherche coordonnée et de ses projets sur le terrain, l’AIEA fournit également une assistance pratique, notamment des orientations et un appui spécialisé, ainsi que des matières biologiques aux États Membres. Elle joue un rôle clé dans la mise en œuvre des programmes de gestion intégrée des ravageurs à l’échelle d’une zone, en partageant des ressources en la matière. Pour en savoir plus sur les travaux de l’AIEA dans le domaine de la lutte contre les ravageurs, cliquez ici.

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