L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) réunit cette semaine des experts africains de la santé humaine, des sciences vétérinaires et de la faune et la flore en vue de renforcer les systèmes d’alerte rapide dans le cadre de la lutte contre les épidémies de maladies transmises par l’animal à l’homme, ou zoonoses.
Plus de 150 participants de 40 pays africains se réunissent au Siège de l’AIEA, à Vienne, pour partager leur expérience dans le but de renforcer les réseaux nationaux de surveillance mis en place pour mesurer et limiter la propagation de virus hautement contagieux, comme le virus Ebola, le virus de Marburg et les virus de la grippe aviaire, de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo et de la variole du singe.
Cette réunion, organisée du 21 au 25 août, s’inscrit dans le cadre d’un projet conjoint (article en anglais) de l’AIEA et de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) lancé en 2014, quand l’épidémie de maladie à virus Ebola frappait l’Afrique de l’Ouest. Ce projet vise à mettre à la disposition des pays africains du matériel de diagnostic et des formations. La technologie d’amplification génique (ou PCR) dérivée du nucléaire permet d’identifier les virus avec une grande précision en quelques heures. Elle est essentielle à la détection rapide et à la maîtrise des zoonoses et des maladies animales transfrontières. Ce projet a également pour objet de renforcer le réseau de laboratoires vétérinaires du continent.
La réunion rassemble des experts de la FAO, de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) des États-Unis, de l’Institut national des maladies transmissibles d’Afrique du Sud, de l’Institut national japonais des maladies infectieuses (NIID), de l’Université de Marbourg, en Allemagne, du Réseau international des instituts Pasteur et de l’Institut zooprophylactique expérimental de Venise, en Italie.
« Comme il est difficile de prévoir où et quand la prochaine épidémie sévira, il est très important que les pays vulnérables, notamment en Afrique subsaharienne, soient préparés à long terme », explique Shaukat Abdulrazak, Directeur de la Division de l’Afrique du Département de la coopération technique.
Environ 75 % des maladies humaines sont d’origine animale. Pour suivre la prévalence des maladies à virus chez les animaux sauvages qui traversent des frontières lors de leur migration et dans les grands troupeaux d’élevage du continent africain, il est nécessaire de disposer de systèmes de détection fiables et d’établir une bonne communication entre les professionnels spécialisés dans la santé des animaux sauvages, des humains et des animaux d’élevage, afin que les mesures de lutte contre une épidémie puissent être prises très vite.
La croissance de la population humaine et l’arrivée de l’homme dans des zones reculées, en conjonction avec des facteurs environnementaux tels que le changement climatique, ont également favorisé la transmission de maladies des animaux aux humains.
« Le Togo abrite 16 millions d’oiseaux, alors notre santé dépend dans une large mesure de la leur », déclare Yao Pataname Akpeli, chef du réseau de surveillance national du Togo, qui participe à la réunion. En juin, ce pays a reçu du matériel et bénéficié de formations de l’AIEA, ce qui l’a aidé à endiguer une épidémie de grippe aviaire.
« La détection précoce est la clé du succès », explique Trevor Shoemaker, épistémologiste au CDC, qui a été en poste en Ouganda. « S’il est difficile d’éviter les tous premiers cas ou les toutes premières victimes, on peut empêcher que d’autres personnes soient infectées. »
Les capacités de diagnostic se sont certes considérablement développées en Afrique ces dix dernières années, en partie grâce aux interventions internationales lors des récentes crises sanitaires, mais la coordination des mesures prises pour faire face aux épidémies continue de poser problème dans de nombreuses régions du continent.
« Cet aspect est très important », ajoute Trevor Shoemaker. « Il arrive que certains pays disposent des moyens nécessaires pour prélever des échantillons et détecter les infections mais n’aient pas les ressources nécessaires pour intervenir rapidement, tandis que d’autres sont capables d’intervenir et de circonscrire très rapidement la maladie mais n’ont pas accès aux tests de diagnostic qui leur permettraient de suivre la progression de l’épidémie ou de dépister et de confirmer de nouveaux cas. »
La réunion de l’AIEA a pour but d’aider à combler ces manques en facilitant l’établissement de réseaux mettant en relation les autorités chargées de la santé des animaux sauvages, des humains et des animaux d’élevage, afin qu’elles puissent partager rapidement des informations épidémiologiques et des données de surveillance.
« Le virus Ebola menace toujours. Au moment où nous échangeons ces paroles, une nouvelle épidémie vient peut-être d’être signalée », fait observer Janusz Tadeusz Paweska, de l’Institut national des maladies transmissibles d’Afrique du Sud, qui a contribué à la création de capacités de laboratoires de diagnostic en Sierra Leone pendant l’épidémie de maladie à virus Ebola. « Une fois le réseau établi, on dispose d’une structure qui permet d’intervenir bien plus rapidement », ajoute-t-il.
L’assistance fournie par l’AIEA aux pays africains pour les aider à se préparer à faire face aux zoonoses est financée grâce à des contributions du Japon, des États-Unis d’Amérique et de la Norvège, et à des fonds versés dans le cadre de l’Accord régional de coopération pour l’Afrique sur la recherche, le développement et la formation dans le domaine de la science et de la technologie nucléaires (AFRA).