You are here

L’AIEA et une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient

Nuno Luzio

Cinq zones exemptes d’armes nucléaires (ZEAN) ont été créées au cours des dernières décennies, les États signataires s’engageant, entre autres obligations, à ne pas détenir d’armes nucléaires sur le territoire de la ZEAN concernée et à conclure des accords de garanties généralisées avec l’AIEA (voir cette page).

Des initiatives ont également été prises pour créer une zone exempte d’armes de destruction massive, y compris d’armes nucléaires, au Moyen-Orient.

L’AIEA a joué un rôle dans le contexte de la création d’une ZEAN au Moyen-Orient et de l’application de garanties intégrales de l’AIEA à toutes les activités nucléaires dans la région.

Dans ses résolutions sur l’application des garanties de l’AIEA au Moyen-Orient, la Conférence générale (CG) de l’AIEA a demandé à toutes les parties directement concernées d’envisager de prendre des mesures pour créer une ZEAN mutuellement et efficacement vérifiable dans la région ; elle a affirmé la nécessité pour tous les États de la région d’accepter l’application des garanties intégrales de l’AIEA ; en outre, elle a chargé le Directeur général de l’AIEA de poursuivre les consultations avec les États de la région afin de faciliter l’application rapide des garanties intégrales de l’AIEA à toutes les activités nucléaires dans la région, étape nécessaire à la création d’une ZEAN.

Parallèlement, la Conférence des Parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) chargée d’examiner le Traité et la question de sa prorogation de 1995 a adopté une résolution appelant à « la création au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes de destruction massive, nucléaires, chimiques et biologiques, et de leurs vecteurs, effectivement soumise à vérification ». Lors des conférences d’examen du TNP qui ont suivi, l’importance de la résolution de 1995 sur le Moyen-Orient a été réaffirmée, et il a été souligné que la résolution restait valable jusqu’à la réalisation de ses buts et objectifs.

Une initiative remontant aux années 1980

En 1988, la CG a demandé au Directeur général Hans Blix de préparer une étude technique sur les différentes modalités d’application des garanties au Moyen-Orient, en tenant compte de l’expérience de l’AIEA en matière d’application des garanties. M. Blix a soumis l’étude technique à la CG en 1989. L’étude contient des descriptifs des accords de garanties conclus entre l’AIEA et les États concernés ainsi qu’une comparaison des différents types d’accords de garanties. La même année, la CG a demandé au Directeur général de consulter les États concernés en vue de l’application des garanties de l’AIEA à toutes les installations nucléaires de la région.

En 1991, la CG a adopté sa première résolution intitulée « Application des garanties de l’AIEA au Moyen-Orient » et demandé au Directeur général de prendre les mesures qui s’imposent pour faciliter l’application rapide des garanties intégrales de l’AIEA à toutes les activités nucléaires au Moyen-Orient et d’établir un modèle d’accord en tenant compte des points de vue des États de la région, en tant qu’étape nécessaire en vue de la création d’une ZEAN.

En 1992, le Directeur général a établi un rapport faisant suite à la résolution de 1991 de la CG dans lequel il a recensé les éventuels besoins en matière de vérification nucléaire ainsi que les moyens de procéder à cette vérification dans une telle zone.

En 2000, la CG a demandé au Directeur général Mohamed ElBaradei de convoquer un forum qui permettrait aux participants du Moyen-Orient et à d’autres parties intéressées de tirer des enseignements de l’expérience d’autres régions et, en consultation avec les États de la région et d’autres parties intéressées, d’élaborer un ordre du jour et de prévoir des modalités qui permettraient d’assurer le bon déroulement du forum. En leur qualité de Directeur général, Mohamed ElBaradei et, à partir de 2009, Yukiya Amano ont poursuivi ces activités en vue de la convocation d’un forum et ont rendu compte chaque année des résultats de ces activités à la CG.

En novembre 2011, l’AIEA a organisé un Forum sur l’expérience pouvant présenter un intérêt pour la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient. Les participants au Forum ont examiné l’expérience des ZEAN existantes en matière de création de régimes de sécurité régionale et de facilitation du désarmement. Le résumé établi par la présidence a été annexé au rapport du Directeur général sur l’application des garanties de l’AIEA au Moyen-Orient publié le 27 août 2012.

À la suite du Forum de 2011, le Directeur général Amano a poursuivi ses consultations concernant l’application rapide des garanties généralisées de l’AIEA à toutes les activités nucléaires au Moyen-Orient, et a encouragé l’élaboration et l’examen de nouvelles idées et approches qui pourraient contribuer à faire avancer le mandat de l’AIEA.

Le nombre et le type d’accords de garanties conclus par les États du Moyen-Orient (les membres de la Ligue des États arabes, ainsi que l’Iran et Israël) avec l’AIEA ont évolué. Sur les 23 États non dotés d’armes nucléaires de la région qui sont parties au TNP, 21 ont un accord de garanties généralisées en vigueur, et 10 d’entre eux ont également un protocole additionnel en vigueur, qui donne à l’AIEA un accès plus large aux informations et aux sites dans chaque État.

Situation actuelle et prochaines étapes

Bien que l’opinion selon laquelle le régime mondial de non-prolifération nucléaire serait renforcé par la création d’une ZEAN au Moyen-Orient continue de bénéficier d’un large soutien, les États de la région ne sont toujours pas d’accord sur le contenu et les modalités d’un accord relatif à une ZEAN, notamment sur les obligations en matière de garanties qu’ils sont prêts à assumer.

En septembre 2021, la CG a de nouveau adopté une résolution dans laquelle, comme dans les résolutions précédentes, elle a affirmé qu’il était urgent que tous les États du Moyen-Orient acceptent l’application des garanties intégrales de l’AIEA à toutes leurs activités nucléaires. Dans cette résolution, elle a demandé à tous les États de la région de prendre des mesures, et notamment des mesures de confiance et de vérification, en vue de la création d’une ZEAN, et a demandé également aux États de la région de coopérer sans réserve avec le Directeur général dans l’exécution des tâches que lui a confiées la CG.

Depuis son entrée en fonctions en décembre 2019, le Directeur général Rafael Mariano Grossi a continué, conformément au mandat que lui a confié la CG, à consulter les États de la région du Moyen-Orient et à travailler avec eux en vue de trouver la base commune requise pour élaborer des modèles d’accords en tant qu’étape nécessaire en vue de la création d’une ZEAN au Moyen‑Orient. « C’est une partie importante du mandat de l’AIEA, et je compte sur la coopération de toutes les parties concernées », a-t-il déclaré.

 

12/2021
Vol. 62-4

Suivez-nous

Lettre d'information