L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a réceptionné aujourd’hui un envoi d’uranium faiblement enrichi (UFE) dans une installation conçue à cet effet au Kazakhstan, ce qui marque officiellement la création de la banque d’UFE de l’AIEA, qui vise à garantir aux pays la disponibilité du combustible nucléaire.
Propriété de l’AIEA et hébergée par le Kazakhstan, la banque d’uranium faiblement enrichi est l’un des projets les plus ambitieux et les plus difficiles de l’Agence depuis sa fondation en 1957.
« Avec l'arrivée de ce premier envoi, la banque d’UFE de l’AIEA est maintenant créée et opérationnelle », déclare le Directeur général par intérim de l’AIEA, Cornel Feruta. « C’est la première fois que l’AIEA entreprend un projet d’une telle complexité juridique, opérationnelle et logistique ».
Pour le mener à bien, il a fallu une action concertée dans de nombreux domaines des activités de l’AIEA. Il a fallu notamment :
- Négocier un cadre juridique pour la banque d’UFE de l’AIEA avec le Kazakhstan et avec l’exploitant, l’usine métallurgique d’Ulba à Ust-Kamenogorsk, dans l’est du pays.
- Concevoir et construire une installation d’entreposage de l’UFE conforme aux normes de sûreté et aux orientations sur la sécurité de l’AIEA.
- Renforcer avec le Gouvernement du Kazakhstan le cadre législatif et réglementaire du pays.
- Conclure avec la Chine et la Fédération de Russie des accords de transit pour pouvoir transporter l'UFE vers le site et depuis celui-ci, ainsi que des contrats de transport distincts avec les sociétés KTZ Express (Kazakhstan) et TENEX (Russie).
- Acquérir auprès de deux vendeurs 90 tonnes d’UFE, le plus gros achat de l’AIEA au cours de son histoire.
Le premier envoi d’UFE, provenant de la société française Orano Cycle, a d’abord été transporté en camion vers un port français, puis par bateau vers la Fédération de Russie et enfin par train vers le Kazakhstan. À leur arrivée, les 32 cylindres d’UFE (quantité correspondant normalement à une recharge en combustible d'un réacteur à eau ordinaire) ont été vérifiés par des experts de l’AIEA. L’AIEA attend le deuxième envoi d’UFE, provenant de la Kazatomprom, compagnie nucléaire nationale du Kazakhstan, avant la fin de 2019.
Marta Ferrari, directrice par intérim du projet de banque d'UFE de l’AIEA, était sur place pour inspecter l'envoi et signer les documents de livraison. « À cause de la longueur du trajet, il a fallu plus de quatre semaines pour transporter l’UFE jusqu'au site. De nombreux partenaires impliqués dans le projet ont dû se coordonner », dit-elle. « Nous avons ainsi acquis une expérience précieuse et nous pensons bien pouvoir utiliser cette voie d’acheminement lorsqu’un pays demande à être approvisionné en UFE ».
Auparavant, le regretté Yukiya Amano, Directeur général, et le Président du Kazakhstan, Nursultan Nazarbayev, avaient inauguré en août 2017 l'installation d’entreposage d’UFE de l’AIEA à l'usine métallurgique d’Ulba.
La création et l’exploitation de la banque d’UFE de l’AIEA sont entièrement financées par les contributions volontaires des États Membres de l’AIEA et d’autres donateurs à hauteur de 150 millions de dollars É.-U., soit le coût estimé de 20 ans d’exploitation. Les donateurs sont notamment la Nuclear Threat Initiative (NTI), les États-Unis, l’Union européenne, les Émirats arabes unis, le Koweït, la Norvège et le Kazakhstan. Le Kazakhstan contribue également en nature en accueillant la banque d’UFE de l’AIEA.
« Je remercie les donateurs pour leurs généreuses contributions qui ont rendu possible ce projet, ainsi que le Kazakhstan, la Chine et la Fédération de Russie pour leur précieuse coopération », a dit Cornel Feruta.
Contexte
En décembre 2010, le Conseil des gouverneurs de l’AIEA a décidé de mettre en place la banque d’uranium faiblement enrichi de l’AIEA, mécanisme d’assurance de l’approvisionnement en dernier recours pour les États Membres faisant face à une rupture d’approvisionnement du fait de circonstances exceptionnelles et ne pouvant se procurer de combustible nucléaire sur le marché commercial, par des arrangements entre États ni par d'autres moyens. Il s'agit d'une réserve physique de 90 tonnes d’UFE, ingrédient essentiel pour produire le combustible destiné aux centrales nucléaires.
D'autres mécanismes d’assurance de l’approvisionnement ont été mis en place avec l’approbation de l’AIEA, notamment une réserve physique garantie d’UFE gérée par la Fédération de Russie au Centre international d’enrichissement d’uranium d'Angarsk (Fédération de Russie) et une garantie d’assurance de l’approvisionnement donnée par le Royaume-Uni pour les services d’enrichissement d’UFE.
Il y a environ 450 réacteurs nucléaires de puissance en service dans le monde, qui assurent près de 10 % de la production mondiale d’électricité et un tiers de la production totale d’électricité à faibles émissions de carbone. Cinquante-cinq réacteurs nucléaires de puissance sont en construction.