You are here

Comment les bases de données de l’AIEA contribuent au progrès de la recherche sur l’utilisation commerciale de la fusion

Peeva, Aleksandra

Représentation visuelle de la cascade de collisions occasionnant des dommages à un matériau cristallin. (Reproduction avec l’aimable autorisation d’Andrea Sand / Université Aalto)

Pour pouvoir exploiter le potentiel de la fusion nucléaire et produire une énergie abondante dans un cadre commercial, il faut mieux comprendre les plasmas — des gaz ionisés amenés à des chaleurs extrêmes — et mettre au point des matériaux à hautes performances pour les réacteurs. En aidant les scientifiques à étudier le comportement des plasmas et à modéliser les propriétés des matériaux utilisés dans les travaux de recherche sur l’énergie de fusion, les bases de données de l’AIEA contribuent au progrès de la recherche visant à produire de l’énergie à une échelle commerciale.
 

Pour développer l’énergie de fusion, il est essentiel de créer et de maintenir les conditions extrêmes nécessaires pour atteindre le « seuil d’ignition », point à partir duquel la réaction de fusion peut se maintenir grâce à l’énergie qu’elle produit elle-même. Pour que cela soit possible, les combustibles sous forme de plasmas nécessaires à la réaction doivent être confinés pendant suffisamment longtemps pour que le processus de fusion puisse se développer et la température augmenter jusqu’à ce que la réaction s’auto-entretienne.
 

Pour atteindre le seuil d’ignition, les ingénieurs doivent également mettre au point des matériaux à hautes performances pour les parois des réacteurs, afin que celles-ci puissent résister au flux d’énergie constant se traduisant par une émission de neutrons et d’une forte chaleur. Cette énergie chauffe les parois et le bombardement de neutrons peut endommager les matériaux, compromettant ainsi l’intégrité des parois ou engendrant des rejets de ces matériaux dans le plasma, ce qui le refroidit.

Les matériaux dont est constitué le réacteur doivent également absorber aussi peu de tritium (l’un des isotopes de l’hydrogène du combustible de fusion) que possible, le combustible au tritium absorbé étant du combustible perdu pour la réaction. Qui plus est, le tritium est radioactif. Pour limiter autant que possible la quantité et la radiotoxicité des déchets nucléaires qui seront produits à terme, il serait donc préférable d’éviter que les parois du réacteur absorbent du tritium et deviennent radioactives.

Il est indispensable de disposer de données fiables, issues d’expérimentations et de calculs précis, pour pouvoir prévoir les propriétés qui nous intéressent dans les matériaux envisagés.
Christian Hill, Chef de l’Unité des données atomiques et moléculaires de l’AIEA

Étudier le comportement du plasma

Il est nécessaire de bien comprendre comment le plasma se comporte dans un réacteur pour accroître la durée pendant laquelle il peut être confiné par des forces magnétiques. Les bases de données de l’AIEA contiennent des informations sur les processus à l’œuvre dans le cœur du plasma et dans le plasma de bord, de même que dans les systèmes d’injection de neutres utilisés pour chauffer le plasma jusqu’à ignition. On y trouve également des données sur les propriétés des diverses impuretés qui sont délibérément injectées dans le plasma à des fins de diagnostic et pour limiter les instabilités.

La base de données de l’interface ALADDIN de l’AIEA est un répertoire consultable de données collisionnelles évaluées sur les processus qui entrent en jeu dans la fusion. Elle est utilisée par la communauté scientifique pour établir des diagnostics sur le plasma et acquérir des connaissances sur des paramètres importants de cet état de la matière, notamment concernant sa température et sa densité. ALADDIN aide les scientifiques à mieux comprendre les propriétés collisionnelles–radiatives des ions, lesquelles sont d’une importance cruciale pour assurer des diagnostics fiables du plasma.

Modéliser les matériaux utilisés pour la fusion

Comme il n’existe que peu d’installations capables de reproduire les conditions extrêmes d’un réacteur à fusion, il est compliqué de créer de nouveaux matériaux pour les centrales à fusion de demain. Grâce à des techniques de modélisation computationnelle, des plateformes de calcul à hautes performances et des outils de caractérisation expérimentale analytique, les experts parviennent à concevoir des matériaux bien adaptés à un environnement d’énergie de fusion.

La modélisation permet de découvrir de nouveaux matériaux et de prévoir la fiabilité de matériaux existants, ce qui est particulièrement important pour la paroi la plus interne du réacteur, celle qui est la plus proche du plasma dans la cuve du réacteur et protège les composants de cette cuve des dommages engendrés par le plasma.

« Du fait des conditions extrêmes auxquelles est soumise la première paroi d’un réacteur à fusion nucléaire, il convient de choisir avec soin les matériaux utilisés : ceux-ci doivent pouvoir résister à des températures élevées et à un bombardement de particules sans s’éroder, se fragiliser ou devenir radioactifs, et ne doivent pas retenir le combustible à l’hydrogène », explique Christian Hill, Chef de l’Unité des données atomiques et moléculaires de l’AIEA. « Il est indispensable de disposer de données fiables, issues d’expérimentations et de calculs précis, pour pouvoir prévoir les propriétés qui nous intéressent dans les matériaux envisagés. »

Les chercheurs mettent à profit les bases de données de l’AIEA dans le cadre de la recherche sur l’énergie de fusion et pour d’autres applications scientifiques et technologiques relatives aux plasmas. Les données sont collectées et évaluées par l’AIEA par l’intermédiaire de ses réseaux, de ses projets de recherche coordonnée et de ses réunions techniques, puis diffusées grâce à ses bases de données en ligne gratuites, organisées et dotées d’un outil de recherche.

« L’intérêt de cette base de données internationale organisée est qu’elle joue le rôle de référentiel permanent, reconnu et accessible, centralisant des données évaluées qui peuvent être librement consultées par les spécialistes de la fusion. L’Unité des données atomiques et moléculaires de l’AIEA se distingue aussi par son ancienneté : elle existe depuis plus de 40 ans, ce qui est un âge plus que respectable dans la courte histoire de la fusion », ajoute M. Hill.

Les bases de données de l’AIEA sont constamment améliorées et enrichies en fonction des besoins spécifiques en matière de données qu’ont les chercheurs, notamment en ce qui concerne la quantification et les incidences des incertitudes dans les données, ainsi que les techniques de validation, d’organisation et de diffusion des données.

Toutes les bases de données sur la fusion administrées par l’AIEA peuvent être consultées sur : https://amdis.iaea.org/

05/2021
Vol. 62-2

Suivez-nous

Lettre d'information