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Consolider la confiance des populations en temps de crise
L’importance d’une communication efficace
Anne-Sophie Faivre Le Cadre

Lors des exercices d’intervention d’urgence organisés par le Centre des incidents et des urgences de l’AIEA, les responsables de l’information et les experts techniques gèrent ensemble la communication de crise en se servant de diverses plateformes. (Photos : AIEA)
En cas d’urgence publique, la peur se répand en quelques minutes. À l’échelle locale et mondiale, les populations se tournent vers les médias sociaux, tendent l’oreille pour écouter les rumeurs qui circulent et cherchent toute bribe d’information. Malheureusement, ces bribes d’information sont souvent fausses. Tandis que les rumeurs enflent et se déforment, et que la mésinformation – voire désinformation – gagne du terrain, la panique s’empare des populations et leur confiance dans les représentants s’évapore.
Le fait est que la confiance ne peut pas se construire en temps de crise – elle doit déjà avoir été instaurée au préalable. À Tchornobyl en 1986 et à Fukushima en 2011, la mésinformation s’est répandue rapidement, exacerbant la confusion et retardant l’intervention. Dans ces cas comme dans d’autres, l’intervention a dans un premier temps été entravée par le manque d’informations officielles vérifiées, puis parfois par des informations contradictoires. À cela s’est ajoutée la difficulté d’expliquer aux populations les concepts complexes de la radioprotection et les fondements des mesures de protection décidées. Malgré les efforts déployés pour répondre aux préoccupations des populations, certaines personnes ont voulu prendre leurs propres mesures pour se protéger, ce qui n’était pas nécessairement la meilleure chose à faire.
Pour être à même de renforcer la confiance des populations dans le cas très improbable d’une catastrophe, les gouvernements et les autorités de sûreté nucléaire doivent concevoir et mettre en œuvre des stratégies de communication claires et transparentes. Les citoyens doivent apprendre à connaître les sources institutionnelles afin de savoir vers qui se tourner pour obtenir des informations dignes de confiance. La communication sur les mesures à prendre en cas d’urgence doit être régulière et ne doit pas simplement débuter lorsqu’une crise survient. La fiabilité est essentielle, mais elle ne suffit pas à elle seule – il faut également veiller à la cohérence, car lorsque différentes autorités font passer des messages contradictoires, la confusion gagne les populations, et la confiance s’érode. Il est donc indispensable que les parties prenantes se coordonnent, et que cette capacité de coordination soit régulièrement mise à l’épreuve.
« En temps de crise, la confiance dans les autorités peut faire toute la différence entre le chaos et une intervention efficace », explique Carlos Vidal Torres, directeur du Centre des incidents et des urgences (IEC) de l’AIEA. « À l’IEC, nous travaillons sans relâche pour que les gouvernements soient prêts à communiquer rapidement, clairement et de manière crédible. Car en cas d’urgence radiologique, chaque seconde compte. Renforcer la confiance des populations par la préparation n’est pas seulement une bonne pratique, c’est une nécessité. »
Consciente des enjeux, l’AIEA travaille avec les pays pour améliorer la communication de crise. L’IEC propose des formations, des ateliers et des exercices de simulation destinés à tester et à renforcer les plans d’urgence nationaux. À titre d’exemple, les exercices d’urgence comme le ConvEx-2g permettent aux autorités de s’entraîner à réagir aux crises dans un cadre contrôlé. C’est l’occasion pour elles de voir leurs faiblesses pour les traiter avant que celles-ci ne posent réellement problème.
L’un des plus grands défis de la communication de crise est de veiller à transmettre rapidement des informations fiables aux populations. Le Système unifié d’échange d’informations en cas d’incident ou d’urgence de l’AIEA aide les gouvernements à partager des mises à jour en temps réel, lesquelles constituent un outil essentiel pour lutter contre la mésinformation et coordonner les efforts d’intervention. Dans une situation d’urgence qui évolue rapidement, il est indispensable de disposer d’un système de communication unifié.
La mésinformation et la désinformation se propagent rapidement, souvent plus vite que les faits. Les médias sociaux amplifient les spéculations et il est donc primordial que les autorités réagissent immédiatement. Les gouvernements doivent non seulement fournir des mises à jour en temps voulu, mais aussi veiller à ce que leurs messages soient clairs et fondés sur des faits. Le lien avec les communautés, les relations avec les journalistes et les mises à jour régulières hors période de crise peuvent contribuer à établir cette confiance, qui s’avère déterminante en temps de crise.
Pour être plus résilients face à la mésinformation et la désinformation, il ne suffit pas d’utiliser des technologies de pointe, il faut aussi renforcer la confiance des populations. Les gens sont moins susceptibles de se laisser convaincre par des récits trompeurs lorsqu’ils font déjà confiance aux sources officielles. Pour ça, il faut veiller à la cohérence, à la transparence et aux échanges sur le long terme.
Pour l’avenir, l’AIEA prend de nouvelles mesures pour améliorer la communication en cas d’urgence dans le monde entier. « La communication d’urgence est en constante évolution », explique Nayana Jayarajan, responsable de la sensibilisation à l’IEC et secrétaire scientifique d’une réunion technique qui se tiendra en juin 2025 sur les nouveautés en matière de communication d’urgence et de lutte contre la mésinformation, et où les participants s’intéresseront notamment au rôle de l’intelligence artificielle. « Nous devons continuer d’anticiper les problèmes comme la mésinformation et la désinformation, voir comment d’autres secteurs font et tirer parti des nouvelles solutions – de l’intelligence artificielle à la formation ciblée. Notre objectif est d’aider les États Membres à acquérir les compétences, à adopter les systèmes et à instaurer la confiance nécessaires pour communiquer clairement et efficacement dans les moments critiques. »
La communication avec les populations sera également un thème clé de la Conférence internationale sur les urgences nucléaires et radiologiques, qui se tiendra du 1er au 4 décembre 2025 à Riyad (Arabie saoudite). Cette conférence réunira des experts, des décideurs et des professionnels de la communication, et sera l’occasion pour eux d’échanger leurs points de vue et leurs stratégies. À mesure que le paysage de la communication de crise évolue, la coopération internationale devient de plus en plus essentielle pour garantir le partage des meilleures pratiques dans le monde entier et leur mise en œuvre.
L’enjeu est grand. En situation d’urgence, l’incertitude alimente toujours la peur. En investissant aujourd’hui dans la préparation, les gouvernements et les organisations internationales s’assurent qu’en cas de crise, la confiance des populations ne s’érodera pas, mais sera au contraire un pilier qui facilitera l’intervention et contribuera à sauver des vies.