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Décarboner la production d’acier grâce à l’hydrogène d’origine nucléaire
Mariia Platonova
La production d’acier représente plus de 7 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone (CO2). Ce pourcentage devrait grimper en flèche au cours des prochaines décennies, parallèlement à l’augmentation de la demande d’acier, qui est vital pour des secteurs allant de l’énergie et des transports à la construction et aux appareils électroménagers. Toutefois, l’énergie nucléaire pourrait contribuer à mettre la production d’acier sur la voie du zéro émission nette.
Environ deux milliards de tonnes d’acier sont produites chaque année dans le monde. Selon l’Agence internationale de l’énergie, la demande d’acier devrait augmenter de plus d’un tiers d’ici 2050, principalement dans les pays en développement. Un nombre croissant d’entreprises mondiales cherchent des moyens de décarboner les processus industriels de ce secteur qui consomment beaucoup d’énergie.
L’industrie de l’acier dépend largement du coke pour l’alimentation des hauts fourneaux qui transforment le minerai de fer en acier, un processus qui émet de grandes quantités de CO2. Cependant, il est possible de créer de l’acier en utilisant une méthode appelée réduction directe du fer, dans laquelle l’hydrogène réagit avec le minerai de fer sans fusion et émet de la vapeur d’eau mais pas de CO2.
“ « Plusieurs pays un peu partout dans le monde explorent et testent l’utilisation de l’énergie nucléaire pour produire de l’hydrogène propre, notamment pour produire de l’acier. »
« La quantité d’hydrogène nécessaire pour créer de l’acier vert est stupéfiante. Traditionnellement, les combustibles fossiles ont été utilisés pour produire la quasi-totalité de l’hydrogène, c’est pourquoi trouver la quantité nécessaire d’hydrogène décarboné sera l’une des plus grandes difficultés », déclare Francesco Ganda, responsable technique chargé des applications non électriques à l’AIEA. « La production nucléaire d’hydrogène, sans aucune émission, peut réellement changer la donne pour le secteur, car l’énergie d’origine nucléaire peut fournir suffisamment de chaleur et d’électricité 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 pour produire la quantité d’hydrogène nécessaire. Cela pourrait aider à faire d’énormes progrès dans la transition vers l’énergie propre. »
Couplés à une usine de production d’hydrogène, les réacteurs nucléaires de puissance constituent un système de cogénération qui peut produire efficacement de l’énergie et de l’hydrogène, équipé de composants pour l’électrolyse ou les processus thermochimiques. L’électrolyse est un processus qui consiste à utiliser un courant électrique continu pour décomposer des molécules d’eau en hydrogène et en oxygène.
L’électrolyse de l’eau se fait à des températures relativement basses, inférieures à 100 degrés Celsius, tandis que l’électrolyse de la vapeur se fait à des températures beaucoup plus élevées, de l’ordre de 700 à 800 degrés Celsius, et nécessite moins d’électricité que l’électrolyse de l’eau. L’électrolyse de l’eau est un processus dans lequel on utilise de l’électricité pour séparer l’hydrogène de l’oxygène dans l’eau. Ce type de technologie est disponible dans le commerce depuis des décennies. L’électrolyse à haute température repose sur le même principe mais utilise de l’eau sous forme de vapeur, ce qui réduit la quantité d’électricité nécessaire.
Grâce aux progrès réalisés dans les technologies d’électrolyse, la production d’hydrogène à partir de réacteurs nucléaires de puissance traditionnels est plus efficiente et moins coûteuse. Dans au moins une centrale nucléaire aux États-Unis – Prairie Island dans le Minnesota –, on est en train d’installer un électrolyseur à haute température et d’utiliser la chaleur issue du réacteur pour réduire la consommation d’électricité et, par conséquent, le coût de la production nucléaire d’hydrogène.
« Le processus à haute température des électrolyseurs à oxyde solide peut tirer parti de l’énergie thermique issue d’une centrale nucléaire sous forme de vapeur, ce qui rend l’électrolyseur incroyablement efficace », déclare Akhil Batheja, directeur du développement commercial de l’hydrogène chez Bloom Energy, une entreprise qui produit des piles à combustible à oxyde solide pour la production d’énergie. « Étant donné que les coûts de l’électricité représentent la plus grande partie des coûts liés à l’hydrogène par électrolyse, il s’agit de la proposition avec le meilleur rapport qualité-coût pour une centrale nucléaire et pour la production d’hydrogène bas carbone. »
Rôle de l’AIEA
L’AIEA aide les pays en soutenant la recherche sur l’utilisation de la capacité nucléaire existante pour la production d’hydrogène, notamment dans le cadre de projets de recherche coordonnée. Pour aider les pays à évaluer, planifier et élaborer des stratégies de développement de projets de production nucléaire d’hydrogène, l’AIEA organise également des réunions techniques et mis au point le programme d’évaluation économique de l’hydrogène, un outil permettant d’évaluer la viabilité technico-économique de la production d’hydrogène à grande échelle à l’aide de l’énergie nucléaire. En outre, en 2022, l’AIEA a lancé une initiative visant à élaborer une feuille de route pour le déploiement commercial de la production d’hydrogène à l’aide de l’énergie nucléaire et a publié une formation en ligne sur la production d’hydrogène dans le cadre de la cogénération nucléaire.
« Plusieurs pays un peu partout dans le monde explorent et testent l’utilisation de l’énergie nucléaire pour produire de l’hydrogène propre, notamment pour produire de l’acier », déclare Aline des Cloizeaux, directrice de la Division de l’énergie d’origine nucléaire de l’AIEA. « Avec l’avènement d’une nouvelle technologie d’électrolyseur plus efficace et le déploiement de technologies de réacteurs avancés, comme les réacteurs à haute température, l’énergie nucléaire est bien placée pour jouer un rôle essentiel dans la production d’hydrogène propre et dans la décarbonation de la production d’acier et d’autres secteurs industriels. »